lundi, février 15, 2010

Responsabilité, risques et gouvernance

Le Monde.fr, 16 février 2010 - Très intéressante chronique de Pierre-Yves Gomez publiée dans l'édition du quotidien Le Monde et consacrée au lien entre capitalisme, risques et responsabilité (Un capitalisme à responsabilité illimitée, ici). Morceau choisi :
Le libéralisme affirme que la liberté des entrepreneurs est une condition nécessaire au dynamisme économique. Elle est efficace et juste tant que ceux qui l'utilisent subissent les conséquences de choix erronés. (...). Jusqu'à la fin du XIXe siècle, les entreprises étaient suffisamment petites pour que le risque pris par les entrepreneurs puisse être garanti par leur fortune privée. La forme juridique dominante était la commandite, dans laquelle le gérant est responsable sur ses biens personnels en cas de faillite. Le risque pris assurait aussi bien la légitimité de son pouvoir qu'une autolimitation de ses excès. Dans The Control of Industry (Nisbet & Co., 1923), l'économiste anglais Dennis Roberston définit ce lien entre responsabilité et risques encourus comme "la règle d'or" du capitalisme. Mais celle-ci s'est heurtée à une seconde règle d'or : l'accumulation de capital est le moteur du capitalisme. Du fait de la concurrence, les sociétés qui accumulent davantage d'investissement peuvent éliminer les autres ; elles ont donc tendance à accroître leur taille. Les fortunes privées deviennent alors insuffisantes pour garantir des risques grandissants et les familles n'ont plus intérêt à concentrer leur patrimoine dans une seule entité dont la faillite les ruinerait. Aussi, dès les années 1900, la société anonyme remplace celle en commandite ; elle permet d'ouvrir le capital à des actionnaires dont la responsabilité est limitée aux apports en contradiction donc avec la première règle d'or. (...) Elle est connue depuis l'origine du capitalisme, s'est exacerbée du fait que l'économie a produit des firmes gigantesques dans lesquelles actionnaires et dirigeants encourent un risque personnel de plus en plus réduit. Ces sociétés posent un problème politique auquel il faut répondre en clarifiant qui est responsable de quoi, selon quels droits, quels devoirs et en encourant quelles sanctions. C'est le rôle, complexe et tâtonnant, du gouvernement d'entreprise.
A la prochaine ...

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